Nuages sombres

Après des interrogations sur le temps qu’il fera en 2013 et après, la météo semble se préciser et s’assombrir.

Je reproduis ici un extrait d’un article paru dans le « POINT » d’hier qui, indirectement, pourrait venir à l’appui des rumeurs de glissement des tableaux 2012 évoquées dans le billet précédent.

Il y a malgré tout des rayons de soleil qui percent les nuées. Espérons que la réalité s’inspirera de cette image.

« La lettre de cadrage budgétaire envoyée le 31 juillet dernier aux ministres par le chef du gouvernement Jean-Marc Ayrault contenait une bombe à retardement. Les états-majors planchent depuis début septembre sur les annexes non publiées de ce document. Une mesure imposée par Bercy risque de provoquer un séisme parmi l’ensemble du personnel : dans l’annexe de sa lettre de cadrage, Matignon annonce une suppression de 30 % des avancements au choix prévus en 2013, au risque de jeter cul par-dessus tête le fragile édifice des carrières militaires. C’est-à-dire que le tiers des promotions au grade supérieur – à tout le moins celles qui ne dépendent pas mécaniquement de l’ancienneté – ne se produiront pas. Une explication s’impose : on sait que les années Sarkozy avaient été marquées pour les armées par un plan considérable de suppression de postes, s’élevant au total à 54 000 emplois entre 2009 et 2015. Poursuivant sur sa lancée, la défense perdra effectivement dans ce cadre 7 234 postes en 2013 (ce chiffre tient compte de la création de 95 postes à la DGSE et de 69 dans la cyberdéfense, essentiellement à l’Anssi, Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information. En 2014, 7 880 suppressions sont prévues, malgré 45 créations de postes pour la DGSE et 99 dans la cyberdéfense).

Engagements non tenus

Mais les engagements de l’État étaient très clairs et ont été répétés à maintes reprises. Cette diminution d’effectifs devait permettre de « revaloriser » la condition militaire. En clair : augmenter les soldes de bas en haut de l’échelle hiérarchique en affectant à ce mouvement environ la moitié des sommes économisées par les suppressions d’effectifs. En 2010, par exemple, 186 millions d’euros d’économies avaient permis d’affecter 100 millions à la revalorisation de la condition militaire. À cette mesure salariale s’ajoutait une « repyramidation » des carrières, à savoir une accélération des promotions, une élévation du taux d’encadrement, avec davantage d’officiers, de sous officiers et de « petits gradés » chez les engagés volontaires.

« Dépyramidage »

Jean-Marc Ayrault est explicite. Ce mouvement de « repyramidage » est stoppé et repart en marche arrière vers un « dépyramidage », donc une réduction du taux d’encadrement. Crûment, il s’agit d’un blocage du tableau d’avancement dans toutes les armées. Citation de la lettre de cadrage, qui annonce explicitement qu’il s’agit d’un début : « Afin de dépyramider la structure de ses effectifs, le ministère de la Défense réduira de 30 % les volumes d’avancement au choix de ses personnels militaires en 2013. Le ministère de la Défense et le ministère chargé du budget travailleront de concert sur le dépyramidage sur la période 2013-2015. » Le document précise que le GVT (glissement vieillesse technicité) doit s’élever à zéro euro sur la période 2013-2015. Est-ce tenable ?

Promotion sociale et recrutement

Dans les armées où cette nouvelle est encore peu connue, les états-majors s’inquiètent en expliquant que, vis-à-vis de leur personnel, les armées ont une fonction traditionnelle de promotion sociale, puissant facteur de recrutement. Pour l’armée de terre, 50 % des officiers sont d’anciens sous-officiers et 70 % de ces derniers sont issus du rang. »

Incompréhensions (actualisé)

Concernant le premier point du premier témoignage et après contact avec la chancellerie DRHAT : les listes ont été transmises normalement et pas d’information officielle à ce jour sur un gel éventuel.

Deux témoignages parvenus récemment m’ont semblé intéressants à reproduire car ils illustrent avec mesure les difficultés qu’on peut rencontrer lorsqu’il faut  concilier au quotidien les exigences reconnues de notre « métier » d’officier et les contraintes des réorganisations en cours.

C’est par une succession de petites fissures accumulées qu’on fragilise irrémédiablement les plus solides édifices.

La pédagogie et l’appel récurrent  aux « valeurs » ne suffisent pas toujours à faire accepter par tous ce qui ne paraît à certains qu’être l’écume des réformes!

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« J’ai constaté hier dans un régiment que les promotions « automatiques » du  01/08 (CNE, LCL) n’étaient pas sorties au JO.

Le MINDEF aurait reporté toutes les promotions statutaires  afin de différer leur paiement avec effet rétroactif. Si cela est confirmé -je n’ai rien vu d’écrit et tiens l’information du Chef de corps-  mes deux premières réactions ont été :

• de ne plus m’étonner que l’on puisse d’un trait de plume remettre en cause un statut, celui des militaires  alors que ce n’aurait même pas été envisagé pour d’autres catégories de citoyens;
• d’avoir du mal à croire que les économies générées, qui ne me semblent pas considérables, mais je ne suis spécialiste, justifient une telle action en ces temps où les mécontentements « sociaux » semblent croître (à titre d’exemple LOUVOIS me doit toujours 7000 € et j’ai de plus en plus de mal à expliquer à ma famille que c’est pour la France) »

 *

« J’ai assisté récemment à la passation de commandement de la compagnie du Mans du 2^e RMAT (BRUZ) où les commandants d’unité des autres compagnies étaient sur les rangs avec leur fanion.

Deux sur sept sont des civils.

Sans remettre en cause leurs qualités et en supposant (espérant) que le Matériel puisse accorder des TC « normaux » à tous ses capitaines,  je suis choqué par l’image de civils, ayant fait l’effort de mettre une cravate avec leur jean (pour l’un) et tentant, au côté de leur porte-fanion au « présentez-armes », de se composer une attitude digne sans se mettre au « garde-à-vous »  en particulier pour répondre au salut du Chef de corps passant les troupes en revue.

Je ne pense pas être rétrograde ou mesquin mais la partie « visible » de notre spécificité: uniforme, cérémonial, n’est pas du folklore mais la matérialisation de réalités qui nous sont propres et parfois graves.

Croyez que je reste, au quotidien, un officier discipliné et volontaire mais cela devient de plus en plus méritoire … »