A coup de milliards! (actualisé)

Les besoins budgétaires de l’État se situent dans une zone qui échappe souvent à nos références quotidiennes.

Actuellement, « l’épaisseur du trait » est de le milliard d’euros (Md€). Le trou à boucher pour franchir 2012 était évalué jusqu’à ces derniers jours à 10 Md€. Il est revu aujourd’hui 25 juin à 7.5 Md€…quand même!. Dans ce contexte tendu, la Défense apparaît aux yeux de certains comme une poire pour la soif!

On a ainsi pu entendre M. Rocard  proposer de remettre en cause notre composante nucléaire en évoquant un gain possible de 16 Md€. Le « Figaro » en ligne du samedi 23, s’interrogeant sur les sources du dit M. Rocard, avançait lui un coût du nucléaire de 3.4 Md€. Je n’aborderai pas la réflexion stratégique sur le « concept »…c’est un vrai travail de fond qui trouvera sa place dans le futur Livre blanc. J’en reste au déjà complexe aspect budgétaire.

Tout ce qui a été dit est vrai et faux à la fois! M. Rocard se situait, me semble-t-il,  dans une tranche quinquennale…et le « Figaro »  évoquait un coût annuel: 5 fois 3.4…16 à 17 Md€, le compte y est.

Mais quel compte?

Depuis la mise en œuvre de la LOLF, les budgets sont affectés par missions articulées en programmes. La mission Défense en comporte 8 regroupés en trois domaines: défense, mémoire, recherche. Cette présentation graphique permet d’en découvrir le contenu.

Ce point appelle une première remarque: il faut bien savoir de quoi l’on nous parle quand on prononce l’expression « budget de la Défense ». S’agit-il du budget du Ministère (environ 43 Md€) ou bien du « volet défense » (39 Md€ dans la Loi de Finance Initiale: LFI) du budget global ?

Si vous suivez les débats en cours et à venir, vous constatez et constaterez certainement que certains « spécialistes de l’Armée » (pardon je n’ai pas pu résister) slaloment sans trop de maîtrise entre ces différentes portes! Et encore faudrait-il savoir s’il s’agit dans leurs discours d’autorisations d’engagement (AE) ou de crédits de paiement (CP). Ne soyons pas trop exigeants!

Mais venons-en au nucléaire. Le « Figaro » annonce 3.4 Md€. Ce montant est bien celui figurant dans la LFI dans le chapitre « Ressources totales en CP pour les équipements ».

Il comporte pour 2012:

• la commande d’une tranche de production du missile balistique M51.2 ;
• le lancement de la réalisation du programme TRANSOUM relatif aux transmissions stratégiques ;
• la poursuite de la rénovation des avions ravitailleurs C135 participant à la composante aéroportée.

On constate que ce domaine des « équipements » ne couvre pas  la totalité du coût de la composante qui a, comme les  volets « classiques », des ramifications dans les autres programmes, notamment « Préparation et emploi des forces » et « Recherche ». Le décorticage est à partir de là complexe, surtout en ce qui concerne le domaine de la dissuasion, et sort du champ de ce billet…et de mes compétences!

Retenons simplement qu’ici comme ailleurs la recherche de la vérité des chiffres reste un exercice délicat et qu’on aura tendance à leur faire dire ce que l’on veut plutôt que ce qu’ils sont!

Les mois à venir seront à n’en pas douter propices au jonglage « milliardesque » et il deviendra de plus difficile d’y voir clair dans le budget de l’État.

Abordons au moins cette période avec la volonté de ne pas céder au tumulte ambiant et en étant persuadés qu’un rôle d’informateurs objectifs nous incombe.

Nota: les chiffres figurant ici proviennent du site la défense et de celui du budget. Les planches illustrant les programmes LOLF et le budget ont été réalisées par l’auteur. Merci de lui signaler d’éventuelles imprécisions voire erreurs.