(Ad)équation(s) à résoudre
26 10 2010Le bilan, fait lors du conseil d’administration du 22 octobre dernier, confirmait la lente érosion de l’effectif des adhérents (5800). Si les démissions ont régressé au cours des deux années écoulées, les adhésions sont en baisse. Il est certain que l’impact des promotions de l’EMIA à 90 n’y est pas étranger, alors que les OSC et les OAEA ne sont pas encore systématiquement au rendez-vous. Mais ce sont surtout les radiations administratives (défauts répétés de paiement des cotisations) qui se « stabilisent » à environ 300 par an et qui grèvent notre effectif.
Les raisons de cet état de fait sont certainement multiples. Deux semblent évidentes: négligences des uns et manque d’attractivité des projets des autres. Constat brutal me direz-vous, mais au moins faut-il le faire et l’accepter avant d’en corriger les causes.
Mais j’y vois aussi la trace d’une certaine désillusion, voire d’une résignation face à des difficultés qu’on peine à surmonter. Difficultés résistant aux efforts personnels, mais difficultés qu’on perçoit surtout comme échappant au pouvoir de ceux qui sont censés nous aider à les dépasser. Les associations sont des victimes « collatérales » de ce doute. Les mouvements sociaux qui touchent notre pays, et au delà nos voisins européens, sont les traces de ce syndrome.
J’ai trouvé, voici quelques jours (le TGV m’assurant 3 heures de lecture paisible lors de mes allers et retours du siège… Parfois plus!), des repères qui me semblent pertinents, dans la traduction du dernier ouvrage de Tony Judt, historien et sociologue britannique (social-démocrate) décédé en août dernier (*). J’en cite quatre brefs extraits.
« Quelque chose ne va pas dans notre vie. Trente années durant, nous avons érigé en vertu la poursuite de l’intérêt matériel personnel. De ce fait, cette quête est tout ce qui nous reste comme but collectif. Nous connaissons le prix des choses mais nous en ignorons la valeur. »
« Mais même si nous admettons que la vie n’est pas tendue vers un but supérieur (la religion- ndlr), nous devons donner à nos actions un sens qui les transcende. Affirmer que quelque chose est ou n’est pas dans notre intérêt matériel, voilà qui ne suffira pas, le plus souvent, à la plupart d’entre nous. »
Au sujet des inégalités: « Or la fraternité, malgré sa niaiserie en tant qu’objectif politique, s’avère être la condition nécessaire de la politique elle-même. On sait depuis longtemps que tout groupe humain repose sur le sentiment, transmis à travers les générations, d’un avenir commun et d’une dépendance mutuelle. »
Au sujet d’une interrogation sur le sens du mot « utile »: « Si nous nous cantonnons aux problèmes d’efficacité et de productivité économiques en ignorant les considérations éthiques et toute référence à des objectifs sociaux plus généraux, nous ne pouvons espérer y répondre. »
C’est bien dans ce cadre tracé que l’Epaulette a un rôle particulier à tenir. Ce rôle est nourri des réalités que vivent nos membres d’active. Il est enrichi par la distance que nous pouvons prendre par rapport au poids quotidien de ces mêmes réalités.
Ce rôle, c’est de contribuer à donner tout son sens à notre état d’officier. C’est de nous aider à ne pas perdre de vue ces besoins salvateurs de fraternité (nous y ajoutons d’armes) et de dépendance commune. Ce rôle c’est de cultiver et de développer les liens par lesquels ces besoins se concrétisent.
Pardon pour cet effort de lecture imposé en période de vacances! (JFD)
(*) Cet ouvrage n’est pas disponible en français à l’heure actuelle. Il paraîtra aux éditions Héloïse d’Ormesson en 2011. Son titre: « Ill Fares the Land » est tiré d’un texte d’Oliver Goldsmith « The deserted village » (1770): “Ill fares the land , to hastening ills a prey, where wealth accumulates, and men decay.’’
◊ Une amie traductrice m’a livré le secret de ce texte qui échappait à mon anglais « NATO »: « La terre dépérit, proie de maux imminents, où l’argent s’accumule et l’homme périclite »◊ … L’auriez-vous traduit ainsi?
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