Parlons géométrie ◊
11 09 2010
Un contact récent, hors Défense, m’a conduit à échanger sur la géométrie, plus particulièrement sur les pyramides. Notre vénérable pyramide des grades, source directe ou indirecte de toutes nos préoccupations, s’est ainsi retrouvée au centre du débat.
Il ressort de cette cogitation qu’il existe deux types architecturaux de base : la pyramide élitiste et la pyramide méritocratique.
Dans le premier cas, l’édifice se construit à partir d’un grand corps, l’élite, identifié par son origine (ENA, corps des Mines, X Ponts, Normale Sup… Saint Cyr). Ce dispositif, structurellement instable consolide sa base en agrégeant des « auxiliaires » aux horizons, limités par le besoin de respecter des strates hiérarchiques et bornés par des conditions statutaires : CDD, temps partiels, vacataires, voire par des plafonds de verre plus ou moins opaques et étanches (lire par ailleurs). La sélection au sein de l’élite existe cependant, elle se détermine par la voie suivie. Ici les dirigeants seront issus principalement des commerciaux, là de la production ou encore de la voie plutôt que de la traction (SNCF). Ailleurs enfin il s’agira de la voie commandement.
La seconde architecture est « méritocratique » et son élaboration ne diffère de la précédente que par ses fondations et son procédé de construction puisque la figure finale est identique. Le recrutement se fait à partir de « préformés » (Grandes écoles, Universités) et de cadres issus de la formation interne (Masters professionnels en alternance, dispositifs propres de l’entreprise) et donne accès à un niveau de responsabilité. Par la suite, la progression professionnelle passe presque uniquement par des critères opérationnels : rendement, mobilité, capacité d’adaptation. Le filtrage existe mais la prédestination se trouve limitée. Il est vrai que les contraintes d’âge n’ont pas partout la rigidité que nous connaissons.
Ces deux modèles ont leurs limites et tendent à caricaturer l’administration d’une part et de l’autre le monde de l’entreprise.
Là où réside le paradoxe, c’est que la Défense qui rejette souvent l’image de fonctionnaire de ses membres militaires, et c’est justifié par leur statut particulier, applique aussi bien, voire mieux que toute autre administration, le modèle de pyramide élitiste. ◊ Guy TESSIER, président de la commission de la Défense rappelait récemment cette spécificité au sujet des retraites des EVAT: « Le projet de loi qui nous est présenté tend à faire des militaires des fonctionnaires comme les autres. Or, la fonction de soldat est très spécifique. Du reste, ils bénéficient d’un statut différent. Faut-il rappeler que les engagés paient le prix du sang sur les théâtres d’opérations ? » ◊ (19/09/10)
Au-delà du constat ce sont bien les effets et l’avenir qu’il faut considérer. Il n’est pas question de « jeter le bébé avec l’eau du bain », car notre système n’est pas le plus mauvais du monde. Mais faut-il pour autant s’arc-bouter sur des solutions dont la pérennité n’est pas garantie ? N’est-il pas temps de donner du mou à la barre ?
C’est à mon sens cette perspective « structurelle », qui doit éclairer les actions de l’Epaulette quand bien même elles se traduisent au quotidien par des interventions ponctuelles sur de simples problèmes réglementaires ou statutaires. (JFD)
Existerait-il une peur de voir « les plus brillants » quitter le navire car s’estimant trop freinés dans leur carrière? D’où (entre autre) le jeunisme et la première pyramide instituée?
Mais pourrait-on imaginer sélectionner des « moins brillants » dont la foi et l’abnégation ne font aucun doute? (mais alors quelles conséquences en interarmées ou interalliés?)
Car lorsque les sirènes du privé retentissent, la valeur du mot « servir » prend tout son sens!
Je partage ce constat, et ma préférence penche du côté du second modèle. Le MINDEF est en plein chamboulement, c’est une opportunité pour agir dans le sens proposé par le PDT.